Accès rapides :

Vous êtes ici :

  1. Accueil
  2. Publications et outils
  3. Bases de données
  4. Tableaux des maladies professionnelles
  5. Fiche Tableau des maladies professionnelles (rubrique sélectionnée)

Tableaux des maladies professionnelles

Régime général tableau 1

Affections dues au plomb et à ses composés

Revenir à la recherche
Tableau et commentaires

Description clinique de la maladie indemnisable (février 2009)

A. Anémie

Définition de la maladie

L'anémie se définit comme une diminution de la quantité d'hémoglobine contenue par unité de volume de sang, en dessous de 13 g/100 ml chez l'homme et de 12 g/100 ml chez la femme, sans augmentation du volume plasmatique.

Le plomb provoque une anémie de type normochrome (ou légèrement hypochrome), normocytaire (ou légèrement microcytaire), avec augmentation du nombre de réticulocytes et présence d'hématies à granulations basophiles (HGB). Les mécanismes de l' anémie associent une diminution de la synthèse de l'hème et une fragilité membranaire entraînant une diminution de la durée de vie des globules rouges.

Diagnostic

Le diagnostic positif est évoqué sur la clinique, avec pâleur et fatigue. Il est confirmé par la biologie, avec le dosage de l'hémoglobine lors d'une numération formule sanguine.

Il existe de multiples causes d'anémie et le diagnostic étiologique peut nécessiter de nombreux examens complémentaires. Les causes les plus fréquentes sont une diminution du stock de fer de l'organisme (par saignement occulte, chez la femme) ou l'existence d'un syndrome inflammatoire.

L'anémie saturnine n'ayant que peu de spécificité, son diagnostic étiologique repose sur la notion d'exposition au plomb, confirmée par test d'exposition (plombémie augmentée), et sur le retentissement sur la synthèse de l'hème, avec augmentation de l'acide delta-aminolévulinique urinaire (ALA-U) et/ou de la protoporphyrine zinc sanguine (PPZ), associée à l'absence de diminution du stock de fer de l'organisme (ferritine non diminuée). La recherche d'HGB, évocatrices mais non spécifiques du saturnisme, se fait sur lame par un technicien entraîné.

Evolution

L'anémie régresse lentement après cessation de l'exposition. Des atteintes importantes peuvent bénéficier d'un traitement chélateur.

Traitement

Il repose essentiellement sur la soustraction au risque. Dans certains cas, un traitement peut être entrepris par administration de chélateurs, soit en perfusion intraveineuse (calcitétracémate disodique ou EDTA), soit per os (acide dimercaptosuccinique ou DMSA).

Facteurs de risque

Facteurs d'exposition

Les facteurs collectifs dépendent de l'intensité et de la durée de l'exposition, ainsi que de facteurs physico-chimiques (spéciation, granulométrie des poussières...).

Facteurs individuels

Si l'hygiène individuelle est importante, des études récentes montrent l'existence d'une sensibilité biologique individuelle, mais il s'agit encore d'un domaine de recherche.

Estimation théorique du risque en fonction de l'exposition

L'anémie ne survient que pour des plombémies dépassant 40 μg/100 ml.

B. Syndrome douloureux abdominal

Définition de la maladie

Dans sa forme typique, appelée aussi "coliques de plomb", il s'agit d'un syndrome douloureux abdominal aigu, à début brutal, prédominant au creux épigastrique, à irradiation diffuse et évoluant par crises sur un fond continu, associé à de la pâleur et une constipation opiniâtre, mais sans fièvre. Ce tableau s'accompagne habituellement d'une élévation de la pression artérielle. Les formes atténuées sont fréquentes, des formes atypiques sont possibles.

Les mécanismes proposés associent une action directe du plomb sur le système nerveux ou le muscle intestinal, à un effet pharmacologique de l'acide delta-aminolévulnique (ALA) sur la motricité intestinale.

Diagnostic

Le diagnostic positif est évoqué sur le tableau clinique.

Il existe de multiples causes de syndrome douloureux abdominal aigu et leur diagnostic étiologique peut nécessiter de nombreux examens complémentaires.

Bien qu'évocateur chez un salarié exposé au plomb, le diagnostic étiologique repose sur la notion d'exposition importante, confirmée par test d'exposition (plombémie augmentée) et par tests lésionnels (augmentation de l'ALA-Urinaire et/ou de la protoporphyrine zinc sanguine (PPZ)). L'effet thérapeutique rapide d'un traitement chélateur est un argument étiologique.

Evolution

Le syndrome régresse spontanément, en plusieurs heures à quelques jours, après cessation de l'exposition. Un traitement chélateur entraîne une cessation rapide des douleurs.

Traitement

Il repose sur la soustraction au risque et l'administration d'antalgiques et de chélateurs.

Facteurs de risque

Il existe vraisemblablement une sensibilité individuelle.

Estimation théorique du risque en fonction de l'exposition

Ce syndrome est une manifestation aiguë de l'intoxication chronique par le plomb et survient habituellement pour des plombémies très élevées, supérieures à 100 ou 150 μg/100 ml. Certains auteurs ont cependant décrit leur survenue pour des valeurs plus basses, mais toujours supérieures à 40 μg/100 ml.

C1. Néphropathie tubulaire

Définition de la maladie

De façon précoce, l’atteinte de la partie proximale des tubules rénaux due au plomb n’entraîne pas de manifestation clinique et n’est décelée que sur des perturbations biologiques de la fonction tubulaire proximale : fuite dans les urines d’enzymes et de protéines de bas poids moléculaire.
A un stade ultérieur, dans sa forme typique et complète mais exceptionnelle en milieu professionnel, la néphropathie tubulaire réalise un syndrome de Toni-Debré-Fanconi, avec une fuite urinaire de protéines de faible poids moléculaire (bêta2-microglobuline, alpha1-microglobuline, retinol-binding protein), une enzymurie, une glycosurie, une aminoacidurie, une hypercalciurie et une hyperphosphaturie. Un tel tableau ne s’observe que pour des contaminations massives. Il peut entraîner des manifestations cliniques liées à la fuite urinaire du calcium : décalcification  avec douleurs osseuses (ostéomalacie).

Diagnostic

Il s’agit d’un diagnostic biologique, porté sur des anomalies concordantes : protéinurie de faible poids moléculaire : RBP (retinol binding protein), alpha-1-micro-globulinurie, béta-2-microglobulinurie...,
L’absence de spécificité de ces anomalies nécessite la constatation concomitante d’une plombémie supérieure à 400 µg/l (ou l’élévation d’autres biomarqueurs d’exposition).

Évolution

Le syndrome biologique précoce d’atteinte tubulaire proximale régresse spontanément après cessation de l’exposition.

Estimation théorique du risque en fonction de l'exposition

Ce syndrome ne survient que pour des plombémies supérieure à 400 µg/l.
L’atteinte complète de type syndrome de Toni Debré Fanconi ne se voit que dans les intoxications massives avec plombémies dépassant 1500 µg/l.

C2. Néphropathie glomérulaire et tubulo-interstitielle

Définition de la maladie

Il s’agit d’une atteinte rénale chronique qui touche les glomérules et la structure tubulointerstitielle du rein ; elle survient de façon tardive après 10 à 30 ans d’exposition au plomb et elle est définitive. Elle évolue vers une insuffisance rénale chronique c'est-à-dire vers une détérioration de la fonction du rein avec hypertension et hyperuricémie pouvant entraîner des crises de goutte. Les formes symptomatiques avec œdème des membres inférieurs sont historiques en milieu professionnel.

Diagnostic

Le diagnostic de l’atteinte glomérulaire repose sur la constatation d’une macro albuminurie (la macro-albuminurie est l’élimination d’albumine dans les urines à un taux supérieur à 200 mg/l et détectable à la bandelette habituelle). L’insuffisance rénale chronique se manifeste par une élévation de la créatininémie et une chute de la clairance de la créatinine.
Il existe de multiples causes d’insuffisance rénale, la plus fréquente étant le diabète,  le diagnostic étiologique nécessite de nombreux examens complémentaires biologiques ou morphologiques.
L’insuffisance rénale chronique saturnine n’ayant pas de spécificité, son diagnostic étiologique repose sur la notion d’exposition au plomb d’une importance cumulée certaine, confirmée par examens biologiques.

Évolution

Cette néphropathie peut être transitoirement améliorée par l’arrêt de l’exposition et/ou par un traitement chélateur, mais à moyen terme, elle continue de s’aggraver, même après l’éviction du risque.

Traitement

Il repose essentiellement sur la soustraction à l’exposition. Le traitement chélateur peut être discuté.

Estimation théorique du risque en fonction de l'exposition

Les altérations de la fonction glomérulaire ne surviennent que pour des plombémies dépassant 600 µg/l.

D1. Encéphalopathie aiguë

Définition de la maladie

Une encéphalopathie aiguë se définit comme une altération rapide et sévère des fonctions cérébrales supérieures, associée ou non à des troubles de conscience. Cette manifestation, historique en milieu professionnel, est la plus grave du saturnisme. Elle peut se traduire par des manifestations psychiatriques (délire hallucinatoire, psychose), un déficit moteur ou sensitif d'origne central, des convulsions, un coma.

Le mécanisme est vraisemblablement dû à l'action directe du plomb sur les cellules nerveuses et à une hypertension intracrânienne.

Diagnostic

Le diagnostic positif est clinique.

Il existe de multiples causes d'encéphalopathies aiguës. Le diagnostic étiologique nécessite des examens complémentaires, biologiques ou morphologiques, pour éliminer les encéphalopathies secondaires à des lésions anatomiques ou des causes métaboliques, toxiques, infectieuses ou inflammatoires.

L'encéphalopathie saturnine n'ayant pas de spécificité, son diagnostic étiologique repose sur la notion d'exposition aiguë ou d'imprégnation chronique, confirmée par test d'exposition (plombémie augmentée) et par tests lésionnels (augmentation de l'acide delta-aminolévulinique urinaire (ALA-U) et/ou de la protoporphyrine zinc sanguine (PPZ)). Une évaluation du stock de plomb mobilisable dans l'organisme, par plomburie provoquée, peut être utile.

Evolution

L'évolution varie en fonction de l'âge et de l'état général du sujet. Il s'agit d'une affection grave, de pronostic sévère avec possibilité de séquelles définitives du type altération des fonctions supérieures, détérioration du psychisme, épilepsie, voire possibilité de décès.

Traitement

Il repose sur la soustraction du risque et un traitement chélateur.

Facteurs de risque

Il existe une sensibilité individuelle.

Estimation théorique du risque en fonction de l'exposition

L'encéphalopathie aiguë ne survient, chez l'adulte, que pour des plombémies élevées de l'ordre de 2 000µg/L. Il faut noter que la plombémie, qui ne traduit que l'exposition récente, ne reflète que très partiellement la quantité de plomb accumulée dans les cellules cérébrales.

D2. Encéphalopathie chronique

Définition de la maladie

L’encéphalopathie chronique se manifeste par une altération des fonctions cognitives.
Les fonctions cognitives du système nerveux central se définissent comme les capacités de compréhension, d’expression, d'analyse, d'évaluation, de synthèse de décision et d’exécution, acquises au cours de l'existence.
Le plomb provoque au niveau du système nerveux central des manifestations chroniques à type de diminution des capacités intellectuelles, troubles de la mémoire et de l'humeur, céphalées, troubles du sommeil, syndrome dépressif. L'intégration visio-motrice serait particulièrement affectée.

Diagnostic

Les fonctions cognitives sont appréciées par des tests psychotechniques évaluant le ralentissement psychomoteur, la dextérité, la mémoire, les fonctions exécutives et l’attention.
Il existe de nombreuses causes de détérioration cérébrale, la plus fréquente étant l'alcoolisme chronique. Le diagnostic d'alcoolisme chronique repose sur l'interrogatoire, l'examen clinique avec recherche de tremblements, d'une hépatomégalie et des examens biologiques avec perturbation du bilan hépatique, en particulier élévation des transaminases et de la gamma-glutamyl-transpeptidase (gamma-GT), et augmentation du volume des globules rouges. Ces tests objectifs pris isolément ne sont cependant pas spécifiques de l’encéphalopathie alcoolique chronique.
A l'échelon individuel, il est difficile d'établir une relation de cause à effet entre imprégnation saturnine et manifestations infracliniques. Les troubles neurologiques saturnins n’ayant aucune spécificité, leur diagnostic étiologique repose sur la notion d’exposition au plomb d’une importance cumulée certaine, confirmée par examens biologiques (tests d’exposition, tests lésionnels, plomb mobilisable) et par leur absence d’évolution après soustraction de l’exposition.

Évolution

Les troubles neurologiques semblent régresser lorsque l'exposition est stoppée.

Traitement

Il repose essentiellement sur la soustraction au risque. Dans certains cas, un traitement chélateur peut être entrepris.

Estimation théorique du risque en fonction de l'exposition

Chez l'adulte, les perturbations comportementales et psychomotrices n'ont été décrites que pour des plombémies dépassant 400 µg/L.

 

D3. Neuropathies périphériques

Définition de la maladie

Une neuropathie périphérique est un terme générique donné à toute pathologie du système nerveux périphérique, quelle qu'en soit l'étiologie et la symptomatologie. Le plomb est responsable d'une polyneuropathie à prédominance motrice.

Une polyneuropathie motrice est une atteinte des nerfs moteurs, bilatérale, se traduisant par une diminution de la force musculaire, le plus souvent accompagnée, voire précédée, d'amyotrophie.

La forme classique, mais historique en milieu professionnel, se traduit par une paralysie des muscles extenseurs des extrémités des membres supérieurs, en particulier par atteinte du territoire radial entraînant une faiblesse des 2ème, 3ème et 4ème doigts de la main. Les formes actuelles sont faiblement symptomatiques avec paresthésies, ou infracliniques avec, à l'électromyogramme (EMG), ralentissement des vitesses de conduction motrice débutant aux membres supérieurs, puis touchant ensuite les membres inférieurs.

Diagnostic

Le diagnostic positif de neuropathie repose sur la clinique pour les formes symptomatiques et nécessite un EMG montrant un ralentisssement de la conduction nerveuse, seul examen à même de dépister les formes infracliniques.

Il existe de multiples causes de neuropathies périphériques et le diagnostic étiologique peut nécessiter de nombreux examens complémentaires, orientés par la forme clinique et l'EMG.

La neuropathie saturnine n'est pas spécifique, même si elle touche classiquement de façon plus précoce les membres supérieurs que les membres inférieurs, et les nerfs moteurs que les nerfs sensitifs. Son diagnostic étiologique repose sur la notion d'exposition au plomb d'une importance cumulée certaine, confirmée par examens biologiques (tests d'exposition, tests lésionnels, plomb mobilisable) et par l'absence d'aggravation après soustraction au risque.

Évolution

La neuropathie est habituellement réversible, de façon lente, au stade précoce. En cas d'atteinte sévère, la guérison peut être incomplète. Il n'y a pas d'aggravation après l'arrêt de l'exposition au risque. Les atteintes sévères peuvent bénéficier d'un traitement chélateur.

Traitement

Il repose essentiellement sur la soustraction au risque. Dans certains cas, sévères, un traitement chélateur peut être entrepris.

Facteurs de risque

Il existe une sensibilité individuelle.

Estimation théorique du risque en fonction de l'exposition

Les paralysies ne s'observent que pour des plombémies très élevées, dépassant 700 μg/L. La diminution de la vitesse de conduction nerveuse est mieux corrélée avec le plomb osseux ou l'exposition cumulée qu'avec la plombémie.

E. Syndrome biologique

Définition

Ce syndrome associe une élévation de la plombémie au-delà de 500 µg/l et de la protoporphyrine zinc érythrocytaire supérieure à 20 µg/g créatinine

Les protoporphyrines sont des molécules intermédiaires de la synthèse de l'hème dans l'érythrocyte. Le plomb entraîne leur accumulation par inhibition enzymatique. Leur mesure traduit le retentissement du plomb sur la fabrication des globules rouges.

La protoporphyrine habituellement dosée est celle complexée au zinc (PPZ), qui s'accumule dans les globules rouges. Un taux sanguin supérieur à 20 μg/g d'hémoglobine est pathologique. Son élévation est évocatrice, mais non spécifique, d'une exposition au plomb. En particulier, elle est augmentée en cas d'anémie ferriprive (non due au plomb).

La plombémie est le taux de plomb dans le sang. Son élévation est spécifique d'une exposition récente ou en cours. Les laboratoires la réalisant doivent être agréés.

Évolution

Les cinétiques sont différentes. Après cessation de l'exposition, la PPZ diminue lentement, en plusieurs mois.

La cinétique du plomb dans le sang est complexe et traduit un équilibre entre les apports et les stocks, tissulaires et osseux.